Profitant d'une rare journée de liberté dans son emploi du temps chargé, Isabella avait choisi de quitter tôt son appartement, laissant derrière elle les murs familiers pour profiter du beau temps et se promener dans les rues encore paisibles de Copenhague, sa maison depuis huit ans. Originaire de Slagelse, elle était toujours émerveillée par la beauté de la capitale, même après toutes ces années. Ce matin-là ne faisait pas exception. Plongée dans la splendeur de la ville danoise, elle admirait les monuments et les vitrines des magasins, sourire aux lèvres. Les rues pavées s'étendaient devant elle, bordées de bâtiments aux teintes vives qui lui donnaient toujours le sourire. Elle aimait ça. Elle aimait vraiment ça. Être ici, à Copenhague, profiter de la ville... Elle se sentait en harmonie avec celle-ci, perdue dans ses pensées alors qu'elle admirait les détails architecturaux qui l'entouraient.

Soudain, alors qu’elle ne l’avait pas vu venir, elle sent une présence auprès d’elle. Avant même qu'elle ait eu le temps de réagir, elle se retrouve plaquée contre la façade d'un bâtiment par la silhouette d'un homme qui tente de lui arracher son sac à main, qu'elle serre fermement contre son épaule. La brutalité de l'attaque la plonge dans la panique. Elle crie à l'aide, espérant désespérément que quelqu'un viendra à son secours, même si les rues sont presque désertes en ce petit matin. Chaque seconde lui semble une éternité, et elle se sent de plus en plus vulnérable face à son agresseur qui s'acharne sur son sac à main.

L'adrénaline pulse en elle alors qu'elle se défend du mieux qu'elle peut. Ce n'est pas tant le sac qui lui importe, mais ce qu'il contient : ses papiers, ses cartes, son passeport... Pour tout refaire, signaler le vol à la police, attendre des semaines que tout rentre dans l'ordre... Ça, c'était autre chose. Cependant, les passants semblent indifférents à la scène qui se déroule sous leurs yeux et poursuivent leur chemin comme si de rien n'était. Sa terreur s'amplifie à chaque seconde qui s'écoule, donnant l'impression que le temps s'est suspendu, laissant Isabella seule et impuissante face à son agresseur.

- Il a déjà couché avec ?
- Nan !

Que tu réponds à ton jumeau alors qu’il râle, buvant une gorgée de sa boisson énergisante. Toi, tu tires sur ta cigarette en râlant, tout autant que lui. Il grogne, serre la canette dans sa main à la détruire complètement et la jette dans la poubelle la plus proche. Tu pouffes un peu à sa réaction et secoues la tête. Tu sais pourquoi il réagit comme ça. Tu sais pourquoi il est si en colère. Lui, il galère avec une nana, apparemment, intouchable comme il dit et il râle de savoir votre meilleur ami aussi proche de son crush à lui et être incapable d’avancer pour faire le premier pas.

Et au milieu, il y a toi, célibataire depuis presque toujours, qui n’a pas le temps d’y penser, tant le garage te prend un travail monstre. Surtout, depuis que ton père est incapable de gérer l’administratif. Tu dois tout refaire, tout reprendre, vérifier qu’avant sa maladie, s'il avait fait les choses dans l’ordre. Tu tapotes le dos de ton frère en pouffant.

- F’pas la gueule, Sonny… On parle d’Sil’ aussi... Deviens con comme un ado d’vant elle.
- Ouais nan, mais ça se voit qu’il en pince pour elle, c’est ça que je veux te dire, Moony, juste...

Il n’a pas le temps de finir sa phrase que vous entendez des cris dans une ruelle. Un temps. Un regard. Et vous êtes déjà en train de courir ensemble pour voir ce qui se passe. C’est quoi ? Une nana qui se fait emmerder ? Une gamine ? Un vol ? Un viol ? Vous ne savez pas et les scénarios passent dans vos têtes à la vitesse de la lumière jusqu’à ce que vous voyiez la scène.

- HEY DUCON !

Sonny régit en première, sautant dans le dos de l’agresseur alors que tu lui attrapes le bras pour qu’il lâche le sac. Tu te mets ensuite au milieu, le temps que ton frère maîtrise l’homme et soupires. Tu le laisses faire, il est bien plus costaud que toi, plus taillé pour la bagarre. Toi t’es agile, mais tu es plus rapide. Tu soupires et te tournes vers la jeune femme pour lui rendre ses affaires.

- T’nez Mam’zelle. Vous v’lez qu’on appelle les flics pour c’gars ou..

Tu grimaces en entendant un coup-de-poing bien placé et regardes en dessous en voyant ton frère se redresser.

- VOILA ! Il bougera plus pour un moment… Il est juste assommé hein ? On panique pas.

Tu te passes une main sur le visage et regardes la rouquine en souriant doucement.

- Pardon pour m’frangin, l’est… Heu… C’ment dire… Hyperactif ?

Pendant quelques minutes, qui lui donnent l'impression de durer des heures, la jeune femme a l'impression que personne ne viendra l'aider. Pourtant, il y a des gens aux alentours, qui passent devant elle sans se mouiller, sans intervenir. Pas beaucoup de monde, mais un peu. Suffisamment pour mettre son agresseur en déroute s'ils s'y mettaient à quelques passants. Mais non. Rien d'autre que de l'égoïsme. Rien d'autre que des visages qui évitent soigneusement de regarder la scène, qui se contentent de presser l'allure pour fuir le danger aussi rapidement que possible. Et ce type qui s'accroche toujours à son sac, qui essaie encore de le lui dérober, comme s'il croyait qu'il y a des cent et des milles dans ce dernier. D'accord, elle n'est pas à plaindre, elle a une situation correcte, de la à croire que l'on a touché le jackpot en s'en prenant à elle, il y a de la marge. Elle reste une petite graphiste à son compte, après tout. Dans son sac, il n'y a rien de mirobolant. Peut-être dix ou vingt euros d'argent liquide et une carte bleue plafonnée. Une prise correcte mais qui ne vaut pas la peine de prendre le risque d'être arrêté par les flics s'ils se pointent.

C'est quand elle croit que tout est perdu que deux hommes surgissent tout à coup, l'un d'eux interpellant verbalement son agresseur pour détourner son attention tandis que l'autre lui attrape le bras et tire dessus. Le sac cède mais est heureusement récupéré par l'un des deux types venus à son secours, l'autre - qui lui ressemble comme deux gouttes d'eau, ou presque - maintenant toujours l'homme autant que possible.

"- Merci." souffle-t-elle pour l'inconnu quand il y aura son sac.

Il est en train de proposer d'appeler la police pour elle lorsque le bruit d'un coup de poing se fait entendre, les faisant sursauter tous deux - elle plus que lui, d'ailleurs - et se retourner vers l'agresseur, étendu à même le sol, maintenu par l'autre qui se défend, affirmant qu'il a juste assommé ce gars. Rassurant, qu'il puisse y parvenir avec un seul coup de poing. Ou pas.

"- Je… je vois. Du coup c'est peut-être pas une si bonne idée d'appeler la police… on pourrait peut-être juste… l'asseoir là dans un coin ? Il va pas non plus mettre des heures à se réveiller, si ?"