–Ne dit-on pas que ce sont les écorchés qui écrivent les meilleures chansons ?

La première réponse qui me vient à l'esprit est : “Et ils font aussi les plus beaux cadavres”. Il est commun de dire que les meilleurs artistes sont façonnés à grand coup de malheurs et de douleurs. Ouais, paraît que ça inspire. Néanmoins, ce n'est pas vraiment une chose qui m'enchante. Pas du tout même. L'histoire est pleine de ces artistes talentueux partis trop tôt et je n'ai pas envie de voir son nom rejoindre ce club.

Je lui fais donc part de mes inquiétudes quant à notre histoire. J'ai besoin de savoir s'il est vraiment prêt à me laisser une place dans sa vie.

– Je t'aime toi, Emily. Toi et personne d'autre. Tu as une place dans ma vie. Toute la place que tu voudras prendre.

Je ne sais pas comment prendre sa réponse, même si j'ai bien évidemment envie de le croire. Non, je le crois. Je sais qu'il m'aime… Je ne doute pas de ce qu'il veut, ou aimerait vivre auprès de moi… Mais je ne suis pas certaine qu'il soit réellement prêt à cela. Alors même si tout ce qu'il me dit me touche profondément, cela ne m'empêche pas d'avoir peur de faire fausse route.

Il affirme vouloir entamer une thérapie. C'est un bon début…

– J'ai l'impression d'avoir vu tous mes boucliers s'effondrer les uns après les autres, ces derniers mois. J'ai besoin de temps pour réussir à gérer tout ça.
– Voudrais-tu en discuter avec moi ?

Je penche légèrement la tête pour mieux capter son regard.

– Nous avons la fâcheuse tendance, toi comme moi, d'éviter les sujets qui blessent… Mais je ne suis pas certaine que ce soit bien constructif… Je t'aime, Tom. Très sincèrement… Néanmoins, je ne donne pas cher de notre peau si nous continuons ainsi.

"– Voudrais-tu en discuter avec moi ?"

J'acquiesce, incapable de détourner le regard.

"– Nous avons la fâcheuse tendance, toi comme moi, d'éviter les sujets qui blessent… Mais je ne suis pas certaine que ce soit bien constructif… Je t'aime, Tom. Très sincèrement… Néanmoins, je ne donne pas cher de notre peau si nous continuons ainsi."

Je ne peux qu'acquiescer à nouveau.
Elle a raison, bien sûr.
Pourtant...

"– Tu réalises que ça va dans le deux sens", je remarque. "J'apprécierais de pouvoir en discuter avec toi. Mais j'aimerais aussi que tu puisses t'ouvrir à moi sur ce genre de sujets."

Je me relève, et lui tend une main pour l'aider à se verticaliser à son tour.
Je n'ai pas oublié sa gêne lorsque je lui ai offert mon bras pour aller du canapé à la chambre, avant-hier. Pourtant cela ne m'empêche pas de refaire la même chose, pour franchir les quelques mètres qui nous séparent du plan de travail.

Je la laisse s'installer sur l'une des chaises de bar pendant que je nous serre à chacun une tasse de café.

Je m'installe à mon tour, en silence, le regard posé sur ma tasse.
Je ne sais même pas par quoi commencer.

Mais finalement, je lui prends la main, la serrant doucement.

"– Pendant des années, ma vie a été plus ou moins la même. Mon groupe, mon ex, les colères de Jake, les tournées qui n'en finissaient plus. Le même inconfort. Mes boucliers bien rodés, pour survivre, pour garder la tête hors de l'eau. J'étais... satisfait, je dirais. Pas vraiment heureux, mais je m'y étais fait. Mon couple battait de l'aile, mais ce n'était pas non plus dramatique. Juste des disputes qui se faisaient de plus en plus fréquentes. Et puis je m'étais fait aux colères de Jake, aux paparazzis, au fait de ne plus avoir de vie privée."

J'inspire profondément, me replongeant dans cette époque qui a duré tant d'années.

"– J'existais. Sans forcément être vivant", je soupire.

Même si à l'époque je ne m'en rendais pas vraiment compte.

"– Et puis mon ex et moi nous sommes séparés, j'ai entrepris ce voyage, je t'ai rencontré."

J'ai un sourire tendre tandis que je relève les yeux vers elle.

"– Je me suis soudainement retrouvé dans un tel état de déséquilibre. Entre toi, ce concert à L.A, la séparation de mon groupe, Peter, le contrat avec Camille..."

Je secoue la tête.

"– Je suis incapable de gérer tout ça, d'encaisser comme je le faisais avant. J'ai perdu mes automatismes. J'ai l'impression d'être un équilibriste, d'être à fleur de peau. Et pourtant... Ça fait des années que je ne me suis pas senti aussi vivant."

Je me mords la lèvre inférieure.

"– Je suis heureux, et j'ai peur de... Je suis terrifié à l'idée que tout ça disparaisse", je termine dans un souffle.

C'est la première fois que je me confie à quelqu'un de cette manière. J'ignore si c'est une bonne idée.
Si ça se trouve, elle va tout simplement décider que je n'en vaut pas la peine, que tout ce foutoir dans ma tête est trop compliqué à gérer.

Pourtant, je suis toujours là à serrer sa main peut-être un peu trop fort, comme pour m'assurer qu'Emily ne va pas disparaître.

– Tu réalises que ça va dans le deux sens.J'apprécierais de pouvoir en discuter avec toi. Mais j'aimerais aussi que tu puisses t'ouvrir à moi sur ce genre de sujets.
– Je sais oui, je rétorque simplement.

Je suis parfaitement consciente que la discussion doit pouvoir s'ouvrir des deux côtés. Je suis prête à fournir cet effort, à condition qu'il sache poser les bonnes questions. Je ne décide pas de me fermer. C'est totalement physiologique. Les mots se coincent, s'étouffent dans ma gorge sans que je ne puisse rien y faire. C'est aussi perturbant pour les autres que ça l'est pour moi.

Alors, puisqu'il semble suffisamment libre pour parler, je le laisse faire sans l'interrompre. J'écoute, j'essaie de comprendre ce qui le perturbe, le préoccupe. C'est un peu flou pour moi, je l'avoue. C'est difficile d'essayer de se mettre à sa place pour visualiser une chose qui nous est totalement inconnue. Ce stress, je ne l'ai jamais vécu. Je ne me suis jamais retrouvée dans une telle position. Alors même si j'essaie de toutes mes forces, je suis totalement incapable de le comprendre… Mais ce n'est pas grave, n'est-ce pas ?

– Je suis heureux, et j'ai peur de... Je suis terrifié à l'idée que tout ça disparaisse.
– Que quoi disparaisse ? je demande en serrant sa main pour le rassurer.

Je me sens tellement impuissante à présent…

– Tu es talentueux, ton public aime ton travail et t'admire énormément pour ça… Jake n'est plus là pour te crier dessus et vous exploiter. Grâce à cette Camille, tu as enfin la possibilité de chanter tes chansons… Tout s'arrange pour toi, Tom. Je suis très confiante quant à ton avenir et pourtant je ne suis pas du genre à imaginer le futur…

"– Que quoi disparaisse ?" me demande-t-elle.

Cela me rassure de la sentir me serrer la main de cette manière. Ca me prouve que je ne suis pas seul. Que je ne suis plus seul du tout.
Avant, j'avais mon groupe, certes. Enfin, j'avais surtout Jeff.
Mais lors des brèves périodes de repos, j'avais surtout l'impression de tenir la chandelle pour Jeff et sa femme. Et mon ex était souvent absente...

Maintenant, Emily et là. Et j'ai presque encore du mal à y croire.

"– Mon nouveau contrat. Notre relation. Toi", je réponds doucement à sa question. "Tu es la meilleure chose qui me soit arrivée cette année, Emily. Je sais que c'est ridicule, mais j'ai peur de te perdre. J'ai peur que tu décides que je n'en vaut pas la peine."

Je lui avais déjà confié cette angoisse. Et même si elle m'a plusieurs fois rassuré à ce sujet, je ne peux m'empêcher d'éprouver toujours les mêmes craintes.

Je souris en l'entendant me rassurer sur tous ces sujets qui m'angoissent, en énumérant toutes les choses qui ont changé dans mon travail.
Il est vrai que j'ai fait des pas de géant, cette année. Au point que tout ça paraît trop beau pour être vrai.

"Merci. Vraiment", je souffle avec émotions.

J'ai l'impression que cet échange m'a vidé de mon énergie. Je suis presque prêt à retourner m'allonger dans le lit, pour prolonger un peu plus ma nuit.

"– Et toi, alors ? Est-ce qu'il y a quelque chose dont tu as envie de parler ?"

J'hésite un instant, puis je reprends.

"– Vis à vis du nouvel an, ça me va très bien si nous décidons de ne pas le célébrer du tout, tu sais ?"

Pour Noël, je sais que c'est mission impossible. J'ai bien vu toute l'énergie que Lucy avait mis pour décorer la maison.

"– Tu me diras si je peux faire quelque chose pour que Noël soit un peu plus facile à supporter pour toi ?"

– Je sais que c'est ridicule, mais j'ai peur de te perdre. J'ai peur que tu décides que je n'en vaut pas la peine.

Je le reconnais, ce vieil ennemi que l'on appelle syndrome de l'imposteur. Ce dernier m'accompagne depuis des lustres sans que je ne sache d'où il me vient. Mais si j’ai appris à vivre et composer avec lui, je doute que ce soit également le cas de Tom. Je ne suis même pas certaine qu'il sache que cette saleté lui cause autant de stress et d'anxiété totalement inutile. Un thérapeute l'aidera probablement à y voir plus clair. À mieux se comprendre lui-même.

Mais je ne sais pas quoi lui dire pour le rassurer. Que je l'aime ? Oui, c'est vrai aujourd'hui, néanmoins personne ne peut me garantir que ce sera toujours le cas demain. Qui sait ce qui nous attend à l'avenir ? Je ne peux décemment pas lui promettre quoi que ce soit… Pas sur ça. Il n'y a rien de plus fragile que l'amour.

En revanche, je peux aisément le rassurer sur sa carrière, son talent. Je suis sûre que tout ira bien pour lui.

Lorsqu'il me demande si, moi aussi, j'ai envie de lui parler de quelque chose, la réponse est assez simple : non. Pas maintenant du moins. Rien ne me vient.

– Vis à vis du nouvel an, ça me va très bien si nous décidons de ne pas le célébrer du tout, tu sais ?
– Oui, je l'ai bien compris, je rétorque en souriant.
– Tu me diras si je peux faire quelque chose pour que Noël soit un peu plus facile à supporter pour toi ?
– Tu seras là, Tom. C'est suffisant. J'y survivrai.

Je lui offre un autre sourire, puis je viens déposer un baiser sur ses lèvres.

– Ne tarde pas trop pour prendre un rendez-vous chez un thérapeute, d'accord ? je lui demande. Je pense que je devrais en faire de même d'ailleurs.

À l'évidence …

– Je vais me préparer, Lucy ne va pas tarder à venir me chercher. Demain, c'est repos donc si tu veux en profiter pour faire les boutiques…

Je m'empare de nouveau de ses lèvres avant de doucement caresser son visage.

– Repose-toi ce matin. On pourra toujours acheter quelque chose sur la route pour le repas. Alors ne t'embête pas.

Emily m'assure que ma présence sera suffisante pour que Noël se passe bien pour elle. J'accepte pour l'instant cette réponse, même si je me promets de rester vigilant.

Après tout, je ne suis pas le seul à avoir encore des sujets à régler.
Je souris malgré tout lorsqu'elle m'embrasse sur les lèvres.

"– Ne tarde pas trop pour prendre un rendez-vous chez un thérapeute, d'accord ?"
"– Promis, je m'en occupe dès que possible".
"– Je pense que je devrais en faire de même d'ailleurs", ajoute-t-elle.
"– Excellente idée."

Elle m'annonce ensuite que Lucy ne devrait plus tard, mais qu'elle sera libre pour aller faire les boutiques demain.

"– Pourquoi pas, si la météo le permet."

Je n'ai pas vraiment envie de patauger dans la neige fraiche. Mais en même temps, ça me ferait du bien de sortir un peu d'ici.

Je réponds à son baiser, et je garde les yeux fermés tandis qu'elle me caresse le visage. Cette tendresse me plait beaucoup plus que le silence de la veille.

Je me tourne pour venir embrasser sa paume.

"– Repose-toi ce matin. On pourra toujours acheter quelque chose sur la route pour le repas. Alors ne t'embête pas."
"– Ça marche", je souffle.

Je viens caler ma main valide dans sa nuque puis je l'embrasse doucement.

"– Je vais te laisser te préparer."

Lucy arrive dans les minutes qui suivent. Et je regard qu'elle me lance est toujours empreint d'une certaine méfiance.
Même alors que je suis toujours pieds nus dans la cuisine, avec juste un t-shirt et mon boxer.

Je la salue tout de même avec un sourire, même si elle ne me répond que par un bonjour sec.

Le début de matinée s'écoule bien trop lentement à mon goût. Je parviens à retrouver le numéro du psy de Jeff, et je cale un rendez-vous en visio pour dans quelques jours. En espérant que ça soit utile.

Je décide ensuite de me concentrer sur mes chansons. Mais manifestement, l'inspiration ne vient pas.

Mon espace de travail me paraît bien vide, sans Emily à mes côtés. Et la fatigue n'aide pas. Assis à mon bureau, la tête entre les mains, je décide au bout d'une heure de migrer sur le fauteuil, mon carnet à la main.

Et je finis par m'assoupir dans ce dernier, laissant libre court à la fatigue qui m'assaille.

Ces matinées de rééducation sont toujours aussi harassantes. Heureusement, je réussi à négocier quelques jours de repos, même s'il me faut promettre à Ben de marcher tous les jours. De toute façon, je supporte de moins en moins mon fauteuil. Je l'évite autant que possible dans l'espoir de permettre à mes jambes de gagner davantage en force et surtout en résistance.

Comme promis, nous nous arrêtons dans un restaurant pour acheter quelques plats à emporter. Je suis… affamée. Alors il est fort possible que je commande beaucoup trop de choses...

Toute la matinée, Lucy s'est montrée très froide, distante et je sais que cela n'a rien à voir avec moi. Néanmoins, n'ayant aucunement envie de me lancer dans une grande discussion pouvant éventuellement mener à une dispute. Je ne veux pas de cela. Pas maintenant…

De retour chez moi, elle se contente finalement de me déposer. À l'évidence, elle ne souhaite pas voir Tom aujourd'hui. Tant pis.

Épuisée par ma trop longue matinée, je dépose les sacs contenant notre repas sur le comptoir de la cuisine. Je ne trouve pas Tom dans la maison, pas de Nix non plus… Alors je me contente de lui envoyer un texto pour lui dire que je suis de retour. Après cela, je mets nos plats à réchauffer, un à un avant de mettre la table. Mes jambes commencent à me faire mal, alors je m'installe à table en attendant son retour.

Je suis tout d'abord réveillé par le bruit de mon téléphone. Un bruit qui me paraît un peu lointain, pas suffisant pour me sortir complètement de mon sommeil. Je reste dans cet état entre éveil et sommeil durant de longues minutes. Jusqu'à ce qu'une langue baveuse sur ma main me contraigne finalement à ouvrir les yeux.

"– Nix, non !"

Tout fatigué que j'étais, je ne m'étais pas rendu compte que Nix m'avait suivi. Dans un sens, cela ne me pose pas de problème. Du moins, cela ne m'aurait pas dérangé s'il n'avait pas été en train de baver allègrement sur mon carnet. Celui-là même où je consigne toutes mes chansons.

Je me lève en vitesse, faisant reculer Nix de plusieurs pas, et en faisant tomber mon téléphone par la même occasion.

"– Bon sang", je marmonne.

Les deux pages concernées sont bonnes à jeter, réduisant à néant mes efforts de la matinée. Je ne me souviens même plus du tiers des paroles.

Dépité, je ramasse mon téléphone, et jette un bref coup d’œil à ce dernier.

Emily est rentrée. Et son message date d'il y a au moins vingt minutes...

Merde.

"– Merci pour le réveil, mon vieux", je lance à Nix avec une voix un peu plus douce.

Je tends une main vers lui, et sourit lorsqu'il se rapproche doucement.

"– Désolé si je t'ai fait peur. Mais j'apprécierai assez que tu évites de baver sur mon travail."

je lui grattouille le dessus de la tête.
Nix est une présence agréable. Sauf quand il bave sur mes affaires.

"– Allez, suis-moi, ta maîtresse est rentrée."

Cette constatation m'amène un sourire aux lèvres.

Lorsque j'ouvre la porte de la maison, je suis tout d'abord surpris du silence. Je m'étais attendu à une conversation animée entre Emily et Lucy.
Et puis il y a cette odeur de cramé, assez présente.

"– Emily ? Oh non..."

Mon carnet m'échappe des mains, et je me précipite vers la cuisine, et surtout vers le four, duquel s'échappe de la fumée.

Je coupe le four, et surtout je sors ce qu'il contient, avant d'ouvrir les fenêtres pour aérer.

Et enfin, je me tourne vers ma compagne, qui s'est manifestement endormie à sa place.

"– Il est heure de se réveiller", je lui chuchote à l'oreille en posant une main sur son épaule. "Tu as essayé de cramer ta maison ?" je plaisante ensuite avec un sourire moqueur. "Dans un souci de transparence, je tiens à te préciser que je préfère éviter de manger du charbon."

Puis je tourne la tête vers Nix.

"– N'y pense même pas !" je lui lance alors que ce dernier jette des coups d’œil insistants en direction de mon carnet, toujours au sol.

Je me dépêche d'ailleurs d'aller récupérer ce fameux carnet.

"– Ton chien a l'air d'avoir une passion pour la musique", j'ironise en rejoignant Emily tout en tenant du bout des doigts mon carnet, toujours plein de bave.

– Il est heure de se réveiller...

J'ouvre un œil légèrement comateux pour découvrir une pièce remplie de fumée… Des fenêtres ont été ouvertes pour lui permettre de s'évacuer mais cela n'empêche pas l'odeur de venir m'agresser les narines.

–Tu as essayé de cramer ta maison ? "Dans un souci de transparence, je tiens à te préciser que je préfère éviter de manger du charbon.
– C'est pas vrai, je soupire en me redressant beaucoup trop vivement pour mes pauvres jambes. Ces dernières cèdent sous mon poids, me forçant à me rasseoir aussitôt. Mais quelle idiote…

Tom semble prendre la situation à la rigolade… Pas moi. Je me sens atrocement stupide de m'être ainsi endormi et surtout d'avoir laisser cramer notre repas.

– Ton chien a l'air d'avoir une passion pour la musique.
– Erf, dis-je en grimaçant après avoir observé l'état dudit carnet. Je suis désolée …

Cette journée est vraiment très bizarre…

– Bon bah, si tu as faim … Je peux éventuellement te proposer des sandwichs…

"– Je suis désolée …"

J'hausse les épaules. Pour le carnet comme pour le repas, ce n'est vraiment pas grave. Le carnet a juste quelques pages d'abîmées. Et pour le repas...

"– Bon bah, si tu as faim … Je peux éventuellement te proposer des sandwichs…"

Oui, alors non. Surtout si je dois croire Lucy au sujet des talents de ma compagne pour la cuisine.

"– Reste assise, je vais me débrouiller", je la rassure juste avant de l'embrasser sur les lèvres.

Quelques minutes suffisent pour évacuer l'intégralité de la fumée. Restent dans le plat ce qui ressemble de loin à des lasagnes... Ou à quelque chose qui s'en approche, du moins. Mais c'est difficile à dire vis à vis de l'état dans lequel est la mixture.

Je sors ce dernier dehors, dans la neige. Nous pourrons toujours nous en occuper plus tard, lorsqu'il aura fini de fumer.

"– J'en déduis que la matinée a été difficile ?" je lui demande d'une voix calme en allant fermer les fenêtres. "Si ça peut te rassurer, je dormais comme un bienheureux avant que Nix décide de venir me réveiller. J'imagine qu'il t'a entendu rentrer."

Je souris, lui plantant au passage un baiser sur la joue lorsque je reviens dans la cuisine.

"– Donc ne t'excuse pas de t'être assoupie. C'est que tu en avais besoin."

J'ouvre le frigo, puis je sors de quoi nous faire une omelette rapide.

"– Lucy ne mange pas avec nous ?"